Retrouvez ces petites chroniques dans un mail envoyé chaque week-end, où nous écrivons un petit mot sur les activités de la semaine et partageons une idée recette avec la liste des légumes de saison.
Pour les recevoir, laissez-nous votre adresse mail.
Marc et moi avons respectivement grandi dans un pavillon à Montivilliers et un appartement au Havre. Enfants, nous avons appris les saisons plus dans les imagiers que dans les champs et les contacts réguliers que nous avions avec la nature avaient souvent lieu à la forêt de Montgeon.
Ceci n’est pas une critique de notre éducation mais plus une façon de dire que nos enfances étaient assez éloignées de la vie paysanne.
Nos parents ont d’ailleurs accueilli notre soudaine vocation avec étonnement et inquiétudes !
Pourtant, aujourd’hui à La Petite Surface, ils ont trouvé leur place en y apportant chacun et chacune leur patte : de juin à septembre, la mère de Marc récolte avec rigueur les petits fruits (cassis, framboises, fraises, mûres), sa cuisine devient un labo d’expérimentations pour nous faire de délicieuses confitures.
Mes parents eux répondent toujours présents pour nous aider sur les chantiers, en hiver pour les montages et remontages des serres, comme en été pour planter les poireaux et aider aux récoltes.
La Petite Surface est donc devenu pour nous un lieu de retrouvailles en familles et maintenant avec notre fils nous avons moins de raisons d’aller à Montgeon !
Ce que l’on aime aussi dans l’été, en plus du bronzage agricole évidemment, ce sont ces temps de récolte où l’on constitue nos réserves pour l’automne et l’hiver. C’est une façon de se garder des petits morceaux d’été que l’on appréciera plus tard.
Nous les surveillons depuis plusieurs jours et là c’est bon, les fanes des échalotes ont bien jauni, elles sont prêtes à être récoltées. Le top est lancé, la chorégraphie est rodée, chacun, chacune connaît sa partition.
Nous remplissons le camion de cagettes pour se garer au plus près des planches. Dans un seul souffle, l’une récolte, soulève la paille, sépare les bulbes et les dispose dans les cagettes tandis que l’autre se lance dans un ballet de cagettes, portant des piles de vides pour les répartir le long des planches, puis les portant pleines dans l’autre sens pour les empiler dans le camion.
Une fois la récolte terminée, elles seront stockées plusieurs mois jusqu’à épuisement des réserves, en attendant elles sèchent dans la serre sous haute surveillance !
Depuis quelques semaines nous apprenons avec un peu d’étonnement mais beaucoup de plaisir que nombre d’entre vous sont ravis de recevoir nos messages chaque semaine. Cela nous touche beaucoup car nous y consacrons du temps et bien souvent nous nous demandons si nous aurons encore de l’inspiration pour la semaine suivante !
Alors savoir que ces quelques lignes sont lues voire attendues, nous encourage à continuer ! D’ailleurs, dernièrement nous avons reçu de très bons retours après avoir parlé de nos heures bleues. Plusieurs d’entre vous semblaient même nous envier ces moments à travailler au champ, à la tombée du jour.
Alors comme toute histoire a son contre champ, voici en mots et image une de nos dernières heures bleues, celle-ci vous vous fera certainement moins rêver !
Samedi dernier vers 20h30, après une journée plombante de chaleur, nous sortions pour travailler un peu. D’un coup, le ciel s’est noirci, les oiseaux se sont envolés, le vent s’est brusquement levé, apportant avec lui une impression de malaise. Les fortes rafales ont traversé le champ emportant notre serre pépinière jusqu’en bas du marais. Nous avons eu peur que la serre aille jusque sur la route, pour stopper son envol et empêcher que le vent ne s’engouffre à nouveau, nous avons dû sacrifier la bâche à l’opinel.
Ce soir là, nous n’avons pas fait ce que nous avions prévu et maintenant nous devons trouver une nouvelle pépinière !
Notre métier demande d’avoir de multiples compétences et cela va bien au delà de faire pousser des légumes. Nous devons être bricoleurs, comptables et depuis peu savoir utiliser les réseaux…mais finalement c’est de devoir être vendeur qui est le plus compliqué.
Valoriser notre production demande du temps, de l’investissement et de l’imagination.
Tout au long de l’année, nous nous prêtons avec enthousiasme à cet exercice. Mais quand l’abondance de l’été arrive, même si vous êtes de plus en plus nombreux à la vente, un vent de panique souffle sur nous ; cette profusion de légumes coïncide avec les départs en vacances. Ce ralentissement de la demande nous oblige sur les mois d’été à trouver d’autres façons de valoriser notre production.
C’est pourquoi, pour traverser cette période sereinement, nous proposons en plus des paniers de légumes d’une valeur de 15€ récolté le jour même.
Quand les jours rallongent, à cette heure entre le jour et la nuit et une fois notre fils endormi, sur la pointe des pieds, nous remettons nos chaussures de travail et repartons au champ.
A cette période de la saison, le travail ne manque pas et les journées passent trop vite mais bizarrement à ce moment là, nous n’avons pas l’impression de retourner travailler. Nous savourons ces moments où nous sommes pleinement à notre tâche, en sachant que rien ne viendra nous troubler.
Pendant cette petite heure, nous oublions le rythme du maraicher et devenons des jardiniers s’occupant de leur jardin.
Dans les mythes et la littérature, il symbolise la malice ou la ruse mais est aussi vu comme un guide offrant sagesse et conseils ; de tout temps, le renard intrigue, fascine.
Depuis quatre ans, à l’orée de la forêt, nous flairons sa présence, il nous a laissé des traces de son passage sans pour autant se montrer. Mais depuis quelques semaines, il se livre peu à peu, nous l’apercevons et le croisons même en plein jour. Peut-être nous a-t-il assez observés et le voilà rassuré sur nos intentions.
Nous prenons ses apparitions comme une marque de confiance. Il nous plaît de penser que cet animal malin et spirituel, nous laisse entrevoir son monde, lui le messager de la vie sauvage.
Naïvement en devant agriculteur.rice en Normandie, nous pensions pouvoir, au printemps, nous passer d’arrosage.
En 2018, après un mois de mai sans pluie, nous avions bien vu que sans eau, rien ne serait possible, les graines ne germaient pas et les plantes jaunissaient. Nous avions surtout compris que la réputation de la Normandie quant à sa pluviométrie était un peu exagérée ! Constat qui se confirme d’années en années. Très vite, nous avons donc arrosé : d’abord dans l’urgence à l’arrosoir, puis au tuyau d’arrosage jusqu’à se lancer dans les travaux, en creusant des tranchées pour enterrer les tuyaux. Aujourd’hui, une grande partie du champ est arrosé en ouvrant des vannes. Cependant, les techniques agricoles choisies permettent de limiter au maximum l’arrosage :
– Nous ne travaillons pas notre sol pour qu’il conserve sa structure et puisse correctement absorber l’eau.
– Nous couvrons le sol (paillage, bâche…) pour le nourrir, le protéger et garder l’humidité.
– Nous maintenons des zones de biodiversité qui apportent ombre et fraicheur (plantation d’arbres, conservation des herbes hautes, limitation du désherbage.)
Ces choix conjugués à la situation du champ ; entre marais et forêt qui apporte un fort taux d’humidité, nous permettent de traverser ce printemps sec plus sereinement.
Cette semaine, de mercredi midi à vendredi 13h, selon le calendrier biodynamique nous étions en jour fruit, nous avons donc profité de ce créneau pour planter les courges et courgettes.
La biodynamie repose sur l’influence des positions planétaires et lunaires pour le développement des plantes ; les cultiver au moment le plus propice leur apporte santé et vigueur.
Le calendrier biodynamique rédigé et édité chaque année par le MABD (mouvement de l’agriculture biodynamique) découpent les semaines en périodes fruit, fleur, racine et feuille et nous invitent à organiser notre travail au jardin en fonction.
Depuis le début, nous nous aidons, dans la mesure du possible, de ce calendrier pour établir notre planning de semis et plantations. En fonction de la partie de la plante que nous voulons récolter, nous nous en occupons le jour qui lui correspond :
– légumes racines : radis, panais, carottes…
– légumes feuilles : choux, épinards, salade…
– légumes fruits : courgettes, tomates, pois…
Cela concerne plus généralement toutes les activités au champ (taille des arbres, récolte du miel, séchage des plantes, stockage des courges…)
Nous pourrions aussi aller plus loin en apportant des purins ou des préparations biodynamique pour stimuler ou protéger les plantes.
Ce champ de recherche est vaste et fait partie des pistes de réflexion que nous avons pour améliorer nos cultures. La biodynamie est avant tout une réflexion métaphysique sur le vivant, elle reste une discipline relativement jeune (début du XXème) qui donne une explication scientifique à de nombreuses observations et croyances de nos anciens.
On assiste depuis quelques jours à l’explosion de la nature, la vie sort de partout et tout pousse.
Bien sûr cela nous arrange quand on voit les pois se former, les courgettes apparaître et le feuillage des pommes de terre traverser le paillage. Mais cette vie déborde et s’invite sur les zones réservées aux plantations, alors on désherbe, beaucoup même ! Tout en multipliant les tâches au champ pour suivre notre planning : planter, semer, arroser, tondre ou encore installer les grillages pour que les pois s’accrochent, enlever les filets maintenant qu’il fait assez chaud… Là, nous avons encore l’impression de maitriser la situation, naïvement, à ce moment de la saison, nous pensons que cette année c’est bon, nous avons trouvé le bon rythme, le printemps peut s’installer, nous ne perdrons pas le fil. Mais au fond nous savons très bien que courir après la nature sera vain. Comme chaque été, nous aurons ce sentiment d’être un peu dépassés face à toute l’énergie qu’elle déploiera jusqu’à septembre.
Souvent l’on nous demande si nous ne nous sentons pas un peu isolés dans notre champ.
C’est vrai qu’au début nous nous sommes aussi posé la question. Et là je pense à la semaine qui vient de s’écouler :
• les épiceries sont venues récupérer leurs commandes.
• mardi pour la vente à la ferme, les clients étaient au rendez-vous.
• un nouveau partenaire a souhaité découvrir notre façon de travailler.
• un élagueur nous a déposé du broyat.
• une proche est venue passer deux jours.
• vendredi une soixantaine d’élèves de maternelles a visité la ferme.
Une ferme, drôle de mot d’ailleurs pour décrire un lieu ouvert ; ouvert sur l’extérieur, propice aux rencontres et aux apprentissages !
Alors quand parfois, nous nous retrouvons seuls dans le champ, nous apprécions aussi !
Les ventes à la ferme sont terminées depuis déjà deux mois et souvent vous nous demandez ce qu’il se passe à la ferme lorsque les ventes s’arrêtent :
En février, c’était surtout le mois où nous avons fait toutes ces petites choses que nous reportons tout au long de l’année à l’hiver.
… Trier, ranger, nettoyer, réparer, réaménager, se former…
La ferme est un lieu de vie, pour le rester, elle a besoin de ce temps où l’on prend soin d’elle, tout en ré-interrogeant nos habitudes pour préserver notre enthousiasme.
En mars, tout doucement le printemps se rappelle à nous, c’est le moment d’enlever les bâches et de démarrer les cultures de plein champ (oignons, pommes de terre, carottes, épinards…)
La pépinière commence à déborder, les plants de blettes, courgettes, aubergines, salades, céleris… attendent leur tour pour être plantés.
Il est grand temps de nous plonger dans le planning 2022.
Chaque année à cette période nous passons beaucoup (trop) de soirées à planifier les cultures en reprenant et ajustant ce qui a fonctionné ou non au champ.
Pour cela, nous prenons chaque légume un par un (environ une quarantaine) pour noter les dates prévues de semis et de repiquages, les quantités de graines nécessaires, l’emplacement dans le champ et les dates espérées de récolte.
Pour certains légumes, c’est très simple, une date de semi et une date de récolte suffisent, comme pour les oignons, plantés fin mars, récoltés fin juillet puis stockés.
Pour d’autres, cela se complique, les épinards par exemple, nous devons prévoir huit semis différents sous serre et en extérieur pour en avoir tout au long du printemps puis en automne/hiver. A cela s’ajoute les caractéristiques liées aux variétés, pour les choux-fleurs, à nous de choisir la bonne variété à la bonne période, le goodman arrivera en juin, le neckarperle à l’automne et le tardif d’Angers passera tout l’hiver au champ et fera sa pomme en mars/avril.
Ces moments de réflexion ne sont pas toujours limpides : « Attends, tu parles du semi ou du repiquage ? » ou « Les tomates flammées, les petites jaunes ? Oui on en fait plus, tout le monde les aime ! »
Bref, vous l’aurez compris, lors de ces soirées nous pensons à vous, clientes et clients et à ce qu’il vous fera plaisir de cuisiner !
Sur les deux hectares qui nous arpentons chaque jour, il est toujours étonnant de réaliser comme l’espace si familier peut nous apparaître si différent au fil des mois.
Début décembre, les pieds dans la gadoue, le bout du champ que l’on distingue dans la brume, il est doux et rassurant de se rappeler qu’à ce même endroit, d’ici cinq mois, les sureaux en fleurs seront mis en bouteille pour en faire du pétillant, les abeilles feront leurs premières sorties et les petits pois seront prêts à être récoltés.
Cette perspective printanière, nous accompagnera dans le champ aujourd’hui, lorsque nous préparerons les commandes des restaurants emmitouflés et bercés par le vent et la bruine !
En travaillant avec les saisons et en pratiquant des activités liées à l’agriculture et au travail des champs, nous avons pu comprendre (souvent malgré nous) la signification et l’origine d’expressions régulièrement utilisées.
Le plus souvent, c’est en les utilisant au sens propre que le sens figuré nous est apparu évident ! Un exemple, c’est le début de l’automne, les journées raccourcissent, les derniers haricots viennent d’être récoltés et la longue période de l’hiver nous attend.
Cette « fin des haricots » en dit long sur les mois qui nous attendent… Ou encore quand je vois au champ les poireaux plantés en juin et qui attendront tout l’hiver au champ, fièrement dressés sous le vent et la pluie à attendre qu’on les récolte, on comprend mieux pourquoi il n’a y rien de passionnant à « poireauter » !
A partir de l’automne, certains légumes demandent à être récoltés puis stockés pour être vendus tout au long de la saison. D’autres supportent le froid, ils resteront au champ et seront récoltés tout au long de l’hiver.
Les légumes qui restent au champ : poireaux, choux verts et rouges, choux de Bruxelles, choux kale, mâche, blette, céleris raves, panais.
Les légumes stockés en cave : navets, betteraves rouges et chioggia, pommes de terre, patates douces, hélianthis (proche du topinambour).
Les courges, récoltées début octobre, sont conservées dans une pièce chauffée pour tenir tout l’hiver.
L’ail, les échalotes, oignons jaunes et rouges ont été récoltés cet été et sont depuis stockées au sec.